Technique de puncture des points myalgiques (dry needling) : technique d'avenir pour traiter à court terme les contractures (2e partie)
Pascal Pommerol
Kinésithér Scient 2016,0578:41-42 - 10/07/2016
Efficacité de la technique sur les douleurs
Il existe plusieurs publications :
• En 2013, Kietrys et al. [3] ont fait une revue systématique avec méta-analyse des études comparant le dry needling ou puncture séche à un placebo, à l’absence de traitement ou à d’autres traitements à court et/ou moyen termes dans le traitement de la partie supérieure de l’appareil musculo-squelettique.
Sur les 246 articles sélectionnés, 12 études contrôlées randomisées ont été retenues.
Trois études comparant la technique par rapport au placebo ou à l’absence de traitement mettent en évidence un effet antalgique immédiat ou à court terme (un mois) de la technique de puncture.
La comparaison avec les autres traitements dans les autres études donnent des résultats très hétérogènes, il y a des preuves issues de deux études sur l’avantage des infiltrations de lidocaïne dans le traitement des points gâchettes comparativement à la puncture sans produit (dry needling) à 4 semaines.
• En 2015, Arias-Buría et al. [4] ont réalisé une étude comparative, randomnisée (n = 20 patients ; âge 58 ± 12 ans), avec douleur postopératoire à l'épaule après chirurgie. Les patients ont été divisés en deux groupes :
– le groupe de physiothérapie (n = 10) qui a reçu des interventions une thérapie physique avec preuve
– le groupe puncture et physiothérapie (n = 10) qui a reçu la même intervention, plus une seule session du TRP-DN ciblée sur les points sensibles actifs.
Les sujets recevant en plus le traitement par puncture et physiothérapie présentaient une plus grande amélioration une semaine après dans le score total Constant-Murley (P < 0,001) et également des activités de la vie quotidienne (P < 0,001) et la force (P = 0,019) que ceux recevant un traitement physique seul. TRP-DN (0,97 < SMD < 1,45). Les deux groupes ont connu des améliorations similaires dans la douleur (P < 0,001) et l'amplitude des mouvements (P < 0,001).
Les auteurs considèrent que l’adjonction d'une seule session de puncture dans la première semaine peut aider à une récupération plus rapide de la fonction chez les personnes souffrant de douleurs à l'épaule postopératoire.
• En 2015, Liu et al. ont fait une revue systématique et méta-analyse (20 études contrôlées randomisées avec n = 839 patients) également sur l’efficacité de ce traitement comparativement aux traitements manuels dans la cervicalgie et les douleurs d’épaule. Les résultats montrent que comparativement à un groupe placebo et/ou contrôle, cette pratique semble plus efficace sur le court terme (premier mois), mais moins que la puncture avec analgésiques comme Kietrys et al. [3].
• En 2015, Boyles et al. [5] recensent dans une revue de littérature très optimiste 19 essais cliniques ayant un score PEDro entre 6 et 10. Des effets significatifs sur la douleur, sur l’amplitude de mouvement et sur au moins un score fonctionnel ou de qualité de vie sont rapportés.
• En 2015, Campa-Moran et al. ont réalisés une étude comparative entre trois groupes (n = 36) en simple aveugle et les auteurs concluent que l’adjonction de technique de puncture avec de la thérapie manuelle permet une réduction des incapacités à court terme.
• En 2014, Dunning et al., sans remettre en cause la technique, nous invitent lors d’une revue de littérature a être sceptique sur la validité des points triggers et leur diagnostic, et donc d’encourager la recherche pour déterminer un bon protocole d’utilisation.
Il a bien été montré dans la littérature que la thérapie manuelle a des effets supérieurs à un groupe contrôle [8, 9], et que cette technique a un effet supérieur au placebo. Notamment, les deux contribuent à la diminution de la douleur du cadran supérieur [3, 9], surtout à court terme (fig. 5 et 6).
Figure 5 et 6 Jeune patient avec céphalée d’origine cervicale La figure 5 montre le traitement du muscle oblique inférieur de la tête à droite dans un premier temps Puis, figure 6, nous avons alors adjoint le traitement par puncture du splénius gauche et des deux trapèzes supérieurs pour augmenter l’effet antalgique |
Les autres thérapies (comme la kinésithérapie) sont d’une efficacité supérieure au dry needling pour le traitement des contractures musculaires sur le moyen terme et le long terme (après 21 jours). Il existe des études sans résultats de cette technique par rapport à un placebo comme dans l’étude de Cotchett et al. [10] sur des douleurs au niveau du talon. Ce n’est d’ailleurs pas une très bonne indication à notre avis.
Conclusion
Plusieurs études ont démontré des améliorations immédiates ou à court terme dans la douleur et/ou l'invalidité en ciblant des points musculaires.
Il existe peu d’études de haute qualité et à long terme pour l’utilisation des points exclusivement musculaires. Aussi, la pratique de cette technique doit être mieux améliorée et affinée avec de nouvelles connaissances. Les physiothérapeutes ne devraient pas ignorer les conclusions de la littérature occidentale ou biomédicale « acupuncture » qui ont utilisé les mêmes aiguilles sèches pour traiter les patients avec une variété de pathologie lors de nombreux essais contrôlés randomisés.
La fréquence optimale, la durée et l'intensité des aiguilles sèches n’ont pas encore été déterminées, la grande majorité des essais contrôlés randomisés avec aiguilles sèches ont été avec des aiguilles maintenues in situ entre 10 et 30 minutes. Par conséquent, les associations de thérapie physique et les conseils pour utiliser des aiguilles sèches doivent être englobés avec la stimulation des neurones, musculaire, et des tissus conjonctifs, et pas seulement aux « points triggers ». Les preuves en faveur de l’acupuncture ne pouvant être résolument extrapolées pour l’instant à cette technique de puncture.
C’est une technique très simple et très rapide à réaliser sans risque (avec le respect des règles élémentaires). Elle est un excellent adjuvant à la thérapie manuelle pour un effet à court terme. La formation est courte mais nécessite une parfaite connaissance de l’anatomie.
BIBLIOGRAPHIE (suite) [3] Kietrys David M et al. Effectiveness of dry needling for upper-quarter myofascial pain: A systematic review and meta-analysis. J Orthop Sports Phys Ther 2013;43(9):620-34. |
© P. Pommerol